Enjeux et perspectives du partenariat

La réforme de 2018 a transformé en profondeur le système de certification, en donnant aux individus des moyens accrus pour individualiser leur parcours de développement des compétences et construire leur projet professionnel avec les besoins du marché. Pour mettre en adéquation l’offre de formation concernée avec les besoins du marché, France Compétences est chargée de gérer les deux répertoires nationaux, RNCP et RSCH.

Le caractère certifiant de l’offre de formation présente de nombreux intérêts. Cela confère en effet une reconnaissance du dispositif sur le territoire national, une reconnaissance du niveau professionnel de la certification (savoir-faire, employabilité), mais une éligibilité aux financement publics et partiaires (notamment le CPF pour lequel la certification est une condition d’éligibilité). La certification s’avère donc être un élément d’attractivité très fort !

La régulation opérée par France Compétences dans l’enregistrement des certifications a conduit à une réduction significative du nombre de certifications. Parallèlement à cette dynamique, les certificateurs sont amenés à habiliter d’autres organismes de formation à viser leur certification, dans le cadre de partenariats. Focus sur cette dernière dynamique.

Comment rendre son offre de formation certifiante ?

–> Par l’enregistrement d’une certification aux répertoires nationaux

L’élément d’attractivité le plus fort pour un organisme de formation est sans doute le fait d’obtenir l’enregistrement de sa propre certification. Sur la base d’un dispositif de formation existant, cette procédure nécessite un travail d’ingénierie de certification, puis une instruction de 7 mois en moyenne par France Compétences.

Au RNCP : un taux d’enregistrement en baisse de 62% (rapport d’activité 2020) à 43% (stat du 1er semestre 2021), menant à la division par 2 du nombre de titres depuis 2019.
Au RSCH : taux d’enregistrement stable de 18%, menant à la réduction de 70% du nombre de certifications depuis la fin de validité des anciennes certifications Inventaire.

Constat global sur les exigences : 2 attendus majeurs

  • Démontrer l’utilité des compétences visées au regard des besoins du marché du travail (justifier l’opportunité) et l’impact de l’acquisition de ces compétences pour vos bénéficiaires (justifier la valeur d’usage)
  • Donner des garanties sur la mise en place d’une procédure qualité du déploiement de la certification

–> Par l’habilitation d’un certificateur (le partenariat)

France Compétences recense à ce jour plus de 170 000 habilitations déclarées pour des certifications actives.
Cette tendance est en forte croissance :

  • Janvier 2021 : 42 000 habilitations (13% des fiches RNCP, 8% des fiches RS)
  • Mars 2022 : 170 000 habilitations (54% des fiches RNCP, 57% des fiches RS)

Face à la réduction du nombre de certification, le partenariat s’impose comme une alternative courante.

Différents types d’habilitations existent :

  • La co-certification : chaque organisme est libre de former, d’évaluer et délivrer la certification
  • Le partenariat : le certificateur habilite un organisme partenaire à former et/ou à évaluer, mais il conserve la responsabilité de la délivrance de la certification
  • Une habilitation pour sur une certification (RNCP, bloc de compétences, RS) et est possible pour différentes voies d’accès (formation continue, apprentissage…).

Les enjeux et critères de la recherche du bon partenaire

Plusieurs motifs poussent des organismes de formation à se tourner vers de certificateurs pour devenir partenaire en tant que préparateur d’une certification, par exemple :

  • L’absence d’antériorité ne permettant pas de présenter la valeur d’usage de son dispositif auprès de France Compétences
  • Un ou plusieurs refus d’enregistrement prononcés par France Compétences
  • La difficulté du travail d’ingénierie de certification et le faible taux d’enregistrement…

Plusieurs prérequis d’un partenariat efficace et sécurisé sont à recenser :

  • Un partenariat est possible, dès lors qu’un dispositif de certifiant ayant la même finalité que son dispositif de formation existe.
  • Le partenariat nécessite que le partenaire s’engage à respecter le référentiel de certification, ce qui peut engager des modifications de son ingénierie de formation
  • Le certificateur peut imposer un cahier des charges et des clauses particulières, auxquels le partenaire devra pouvoir répondre, d’autant plus que le certificateur sera tenu de contrôler le bon déploiement de la certification
  • Une négociation financière a lieu afin de nouer le partenariat, une convention de partenariat est établie afin de préciser la répartition des rôles de chaque acteur.

La nécessité de définir les responsabilités de chaque partie

Si le partenariat est aujourd’hui une pratique non réglementée, elle s’avère être contrôlée. En janvier 2021, la Caisse des Dépôts publiait une page dédiée à la sensibilisation contre les fraudes au CPF, puis France Compétences lançait un appel aux certificateurs en mars 2021 afin qu’ils déclarent l’ensemble des partenaires habilités. Depuis le 24 janvier 2022, la Caisse des Dépôts procède au déréférencement des organismes de formation ayant une offre de formation proposée sur EDOF sans pour autant être habilités à préparer la certification à laquelle la formation est adossée.

Pour maîtriser le déploiement d’une certification et répondre à l’exigence de qualité de France Compétences, la convention de partenariat liant le certificateur à son préparateur doit préciser les responsabilités de chaque partie.

Les responsabilités du certificateur :

  • Définir et appliquer une procédure d’habilitation des partenaires
  • Fournir aux partenaires les documents nécessaires au bon déploiement du dispositif
  • Définir et appliquer une procédure de contrôle, par contrôle des informations fournies par le préparateur ou par audit (communication sur la certification par les partenaires, respect du prérequis, du cahier des charges formation, du référentiel de certification…) et le cas échéant, définition de mesures de traitement des dysfonctionnements
  • Organiser le jury de certification et assurer la délivrance de la certification
  • Assurer l’amélioration continue du dispositif et préparer le renouvellement de la certification

Les responsabilités des partenaires habilités :

  • Respecter les conditions d’habilitation définies par le certificateur
  • Si habilitation à former : respecter le cahier des charges formation, mettre en place un dispositif de formation permettant le passage de la certification
  • Si habilitation à évaluer : concevoir et organiser les épreuves d’évaluations dans le respect des modalités prévues par le référentiel d’évaluation, transmettre les résultats des évaluations au certificateur

En somme, le partenariat est devenu une pratique courante et s’avère être un levier de développement pour le certificateur qui assurer un large déploiement de sa certification et obtient une contrepartie financière, et pour le préparateur qui rend son offre certifiante et tire profit de cette attractivité.

Ce fonctionnement connait une exigence accrue d’encadrement, visible notamment à travers l’exigence de France Compétences lors de la procédure d’enregistrement d’une certification.
Cet enjeu est alors à prendre en compte par l’ensemble des prestataires d’actions concourant au développement des compétences. La définition de sa stratégie de valorisation de son offre pour la rendre certifiante, comme la définition des termes d’un partenariat et de ses modalités de fonctionnement, sont autant de défis pour les acteurs de la formation professionnelle.

Alain GOUET – 04/2022